[Déplacé depuis PJ - Epimethée][Jeu] Introduction :

Dans sa vie, Menès a rarement eu le contrôle des évènements, et encore moins de ses voyages. Quand il est parti du dernier endroit qu'il pouvait appeler un foyer en se jurant de n'en jamais perdre la clé, c'était pour subir de terribles épreuves à la frontière du terrible Meskhenet et des mortlles dunes de Hatifah. Quand il a ensuite cherché sa place dans son pays, il n'a pas eu beaucoup d'autres choix que de se laisser porter par le Iometh, se trouvant à chaque escale incapable de trouver des personnes qui l'accepteraient pour ce qu'il est et pas de lui jeter des pierres pour le punir de vouloir simplement survivre et garder sa dignité. Il aurait pu essayer de se faire une place à coups de griffes, ou pire encore, mais ce serait taillader directement dans son honneur pour le mettre à une place qui ne lui revient pas.

Maintenant il est au bout de ce fleuve qui l'a sauvé des cauchemars du désert, et le port d'Haji, fébrile de l'activité commerciale générée par la Semaine des Dons qui s'ajoute aux célébrations de Velhazzar, lui semble déjà lointain alors qu'il marche dans sa propre méditation sur le destin que Jihamath tarde à lui révéler.

Sous la première pleine lune de la première nuit d'Avril, ses pas le portent naturellement vers l'endroit le plus calme de la ville, la Pierre du Destin, îlot de sérénité sur le fleuve de Vie. Tout le monde est à la fête en ville, les offices du jour depuis longtemps terminés, ceux de l'aurore encore lointains, le silence n'est troublé que par le murmure lointain des destinées de milliers d'étrangers et de celui du fleuve qui les nourrit. Sous la pleine lune qui n'a jamais semblée si grosse à Menès, s'étendent les parvis des temples des 9 kalihs, de Jaroh et de Jihamath, et leurs immenses jardins si propices aux promenades nocturnes et aux réflexions existencielles. La croix de vie sur le cou du jeune errant se rafraîchit, signe que cette nuit si particulière avance, mais sans avoir encore offert tous les bienfaits qu'on lui vante...

J'avance vers les jardins, un peu dans les ombres mais sans vraiment me cacher. Ne sachant où dormir, je compte profiter un peu de la nuit avant de me décider. Ce n'est pas une heure pour prier les Khalis mais j'ai un léger geste de déférence dans la direction de leurs temples tandis que je traverse la place.

[Menès voit parfaitement dans cette luminosité]

Quand tu avances à travers les jardins, au détour d'une statue tu aperçois entre deux des immenses temples un bâtiment plus petit mais dont la façade est très ouvragée, dans l'ombre d'un bosquet inhabituellement resserré dans ce genre de jardins, et constitué d'arbres hauts aux troncs d'un brun-rouge sombre et aux branches couvertes d'aiguilles aplaties. Sans ta facilité à voir dans le noir tu aurais sûrement pensé que les petites lumières qui filtrent des fenêtres aux volets clos étaient celles de la ville au loin. Alors que tu vois tout ça, de fines odeurs de cuisine qui te sont étrangères semblent baigner l'atmosphère petit à petit.

Je me dirige vers le petit bâtiment, sans doute plus attiré par l'odeur que par réel intérêt. Je reste en périphérie des bosquets mais observe attentivement l'édicule.

A mesure que tu t'approches, tu reconnais dans le fond de l'air des relents sucrés et alcoolisés. La façade est vraiment particulière maintenant qu'à portée de vue: dans les motifs de bas-reliefs plus ou moins traditionnels qui couvrent les murs de pierre tu reconnais un gros croissant de lune, surplombant ce qui semble être une porte en bois vernie presque rouge dont la poignée, et le heurtoir d'ailleurs, sont aussi en formes de croissants aigus, et apparemment recouverts d'or. De plus, des éclats de voix lointains te parviennent de l'intérieur.

Bon c'est certainement une taverne ou un salon de thé. Je reste à l'extérieur un temps afin d'évaluer la clientèle et j'en profite pour grignoter quelques provisions à la belle étoile.

Ensuite, selon les circonstances, je tenterai d'entrer. Comme je suis pas non plus trop riche, je préfère ne pas aller perdre mes trois francs six sous dans ce genre de plan. Mais comme il y a de la lumière, je finirai bien par entrer...

Pendant que tu grignotes, il n'y a aucun changement à l'extérieur, aucun mouvement dans les jardins ou les temples. A l'intérieur, les voix, ne donnant jamais l'impression d'une grande assemblée, se taisent parfois, puis reprennent, haussent parfois un peu le ton, mais c'est tout. D'ailleurs, il n'y a aucune enseigne d'aucune sorte ni sur la façade ni alentours.

Ce n'est pas le lieux que j'attendais. Je n'ai rien à voir avec ses occupants ni l'intention de me mêler sans raison de ce qui ne me regarde pas. Ainsi, après avoir longé le petit bâtiment, je compte me chercher un coin confortable où poursuivre cette nuit, sans doute dans le jardin.

Je suis pour l'instant assez détendu et pense d'abord au calme vespéral.

[Ce qui explique pourquoi, malgré ma curiosité de joueur, mon personnage semble peu préoccupé et que je ne lance pas de dé de perception]

En continuant ton chemin, flânant au bord des temples, tu te rends compte juste à temps qu'apparemment tu es arrivé, au détour du deuxième temple après la bâtisse éclairée, au bord de l'îlot. Devant toi s'étendent les eaux du fleuve, d'un calme d'huile, et... absolument silencieuses. Pas un brin de vent, pas un éclat de fête, pas une lumière à l'horizon.

Surpris, je jette un rapide regard autour de moi. Voit-on encore de la lumière dans le petit bâtiment? Y a-t-il un mouvement ailleurs? Je m'enfonce ensuite dans un coin d'ombre quelconque afin de réfléchir un instant.

Au fait, les maisons sur l'autre rive sont elles visibles pour mes yeux perçants? Je jette un regard bref.

Plus loin, le bâtiment n'a pas bougé ni changé, et même les feuilles des palmiers sont profondément immobiles, comme engluées dans la lumière de la lune. Côté fleuve, ni les maisons, ni la rive sur laquelle elles sont censées se trouver ne sont visibles.

Alors je suis très attentif à ce qui m'entoure et qui me fait froncer les sourcils. Je prends quelques instants pour évaluer les chemins qui s'offrent à moi dans cette rue, par où passer, par où fuir, où me cacher. Pendant ce temps, je m'approche peut-être de l'eau afin de regarder si quelque chose me frappe.

Ensuite, je compte retourner vers la place, toujours relativement discrètement et prêt à utiliser des chemins acrobatiques. Mon premier objectif est de chercher un être humain ou de confirmer la présence des voix dans le bâtiment.

Au fait, je ne me souviens pas d'une histoire ou d'un récit proche il me semble, mais je me pose la question.

L'eau est huile, pas une ride, pas un mouvement, un vrai miroir. Ton analyse du terrain te fait réaliser qu'à quelques mètres seulement du bord de l'eau c'est déjà la place du jardin entre les temples qui a sur un côté la bâtisse allumée, et en face, le chemin par où tu es venu, seul autre qui donne sur cet espace. Ce dernier devrait donner sur quelques autres esplanades, puis au fond le pont qui relie l'ilot à la ville, mais juste après le cercle des édifices qui entourent le bâtiment allumé, il n'y a que du noir et des étoiles, certaines dans le ciel d'autres dans l'eau, mais de loin c'est très difficile de distinguer où est la limite.

Tu fais un peu le tour de la place avec précaution, prends un peu de hauteur, et constate qu'il n'y a vraiment plus de perceptibles dans ce monde que de l'eau, la place encerclée par les temples et la bâtisse dans le bosquet, le ciel et toi. C'est bien la première fois que tu constates un tel phénomène, et ça ne t'évoque vaguement que de vieux contes du désert qui parlent d'inondations et de déluges, guère pertinents par ce calme plat. Par contre, c'est la nuit de Velhazzar...

Et donc tu reviens vers le bâtiment aux voix, et en effet, quand tu en es assez proche tu parviens encore une fois à ressentir la même odeur et à entendre les mêmes sons de voix étouffées et erratiques.

Je reste dans l'ombre et je détaille le bâtiment. Je cherche particulièrement fenêtres et zones dans l'ombre que je compte utiliser afin de jeter un oeil à l'intérieur si possible. Ah, au fait, je me pince un petit peu pour être sur de mon état de réveil.

Je prends mon temps et j'essaie de rester le plus en sécurité possible, sur mes gardes.

A priori c'est bel et bien la réalité, ou alors on t'a menti sur les vertus des pincements. Prendre un autre chemin que le sol et de face pour t'approcher ne sera pas de tout repos, les arbres denses qui entourent vraiment l'édifice rendent toute approche très difficile. Par contre, ils assureraient une couverture très efficace.
La porte et les deux fenêtres de la façade sont les seules ouvertures visibles dans la pierre sculptée, et toutes sont obturées presque complètement par les panneaux de bois qui servent de volets et de porte, qui ne laissent passer de la lumière que par les petites fentes taillées par l'usage.
Rien ni personne ne viens te déranger pendant ton analyse depuis ton coin d'ombre.

Je choisis le chemin difficile pour m'approcher, quitte à prendre du temps. Je reste le plus attentif possible à ce qui m'entoure et à ce qui m'attend tout au long du chemin.

Je vais m'approcher de la façade discrètement, une fois de plus grâce à mes mouvements libres, essayer d'entendre la conversation, qui n' a peut être aucun rapport mais c'est le seul signe de vie, puis tenter très précautionneusement de jeter un coup d'oeil à travers l'une des fentes.

Et bien sur, je continue à rechercher le moindre signe de vie.

En cette nuit de Velhazzar, "instant destiné" commémorant la date à laquelle El Eyad reçut les révélations de Jihamath, et qui appelle chaque croyant à la méditation sur le chemin de sa vie, tu fais le tien de façon fort peu conventionnelle en te contorsionnant parmi les branchages serrés, réussissant à faire passer ton paquetage avec toi là où on ne penserait même pas faire passer un gros chat. Les bruissements de tes habits et des feuilles redonnent un peu de réalité à la scène, qui revient cependant à son état de mystère profond dès que tu te stabilises sous une fenêtre.

D'aussi prêt, les voix sont un peu plus précises, et semblent celles d'une conversation animée, entrecoupée de rires, de bruits de pas et de silences. Apparemment il y a plusieurs voix qui se répondent, aucune n'ayant l'air d'appartenir à un homme mature, mais il reste difficile de savoir s'il s'agit de femmes ou de jeunes personnes. Ensuite, tu essayes de voir par différentes fentes autour du volet, et identifies une pièce au sol de lattes de bois, qui n'a pas l'air très profonde, bien éclairée, et en face de la porte le mur est fait d'une sorte de papier tendu sur un quadrillage de bois. Pas de meubles ou décorations visibles, ni êtres vivants.

J'observe encore une fois la place et le jardin qui m'entoure. Si rien de vivant ne se montre, je cherche l'entrés de l'édifice, ou une fenêtre plus importante afin de jeter un coup d'oeil plus prononcé à l'intérieur.

Ensuite, je chercherai à entrer par la porte d'entrée.

Toujours rien de changé sur la place ni le jardin. L'entrée est toujours la porte de devant, et il n'y a toujours que les deux fenêtres de la façade. Tu vas rapidement voir à l'autre, aussi fermés, et les interstices donnent une autre vue de la même pièce, avec les mêmes choses à l"intérieur.

Tu vas donc à la porte, tourne la poignée qui fait honneur à ta source de lumière principale depuis un certain temps maintenant, et pousse la porte vers l'intérieur, découvrant une jeune adolescente au sourire accueillant qui semble originaire des contrées chrétiennes, les cheveux blonds remontés en deux petits chignons, et une robe rose pâle ornée de dentelles blanches. Derrière elle la pièce est effectivement vide, sans autres fenêtres que celles de la façade, et les trois autres murs que celui du fond sont en pierre. Une grande lanterne au plafond de bois semble être la source de la lumière ambiante, et l'odeur alcoolisée se fait plus présente.
"Bonsoir monsieur, vous tombez bien, entrez, entrez, je vous en prie, il doit faire frais dehors, et en plus ça a déjà commencé !" dit-elle dans ta langue natale, s'inclinant et t'invitant à entrer très poliment.

J'incline brièvement la tête, les mains drapées dans mon manteau, et je m'avance pour répondre à son invitation, tous les sens en éveil. Je prends cependant bien garde à ne pas parler, et j'essaye de ne montrer ni étonnement ni surprise à ce stade.

Tant que personne ne m'interrogera, ou que la situation évolue, je compte rester discret.

La jeune fille semble intriguée et surprise, visiblement elle s'attendait à un commentaire, un mot, quelque chose, et bafouille en tendant doucement les mains, toujours dans un jashu parfait :
"Eh bien... peut-être pourrais-je vous débarrasser de quelque chose avant d'aller saluer Madame ? Vos sacs, votre manteau ? Ils risquent vraiment de vous encombrer plus que de raison. J'en prendrais grand soin !" finit-elle avec enthousiasme, pendant que la porte se referme seule derrière toi dans un grincement, suivi d'un clic métallique.

Dénouant à peine mon turban afin de laisser voir mon visage, je laisse tomber mon sac et mon outre avant de les lui tendre.

"Soyez remerciée e votre courtoisie, je garderai cependant mes vêtements sur moi"

J'ajoute deux de mes sous de cuivre à mon paquetage avant de suivre son invitation.

Après tout, cette nuit est une nuit prédestinée.

La jeune fille, dans un sourire confiant, prends ce que tu lui as tendu sur un bras, et de l'autre, attrape un des cadres de bois du mur du fond, et le tire pour le faire coulisser sur le côté, vers elle.

Par la porte ainsi créée, s'offre à ta vue une sorte de jardin intérieur éclairé par la pleine lune, dont un côté est occupé par une petite mare bordée de cailloux et de bambous, et l'autre par trois tables de bois verni entourées de bancs. Autour de tout ça, le bâtiment forme un hexagone, et sur chaque face on retrouve le même type de murs de papier sur quadrillage de bois, surplombés d'une avancée du toit de tuiles rouges et profitant d'une avancée du parquet à l'extérieur, comme un trottoir ou un chemin de ronde couvert.

Les tables sont encombrées de plats fumants bien entamés, d'un gros gâteau aux fraises orné d'une bougie dont il manque quelques parts, et de nombreuses bouteilles de céramiques dont certaines sont déjà couchées, probablement vides. Un espace vient apparemment d'être dégagé sur celle du milieu pour une gros pot de céramique blanche à motifs de poissons rouges stylisés, et une planche de bois sur laquelle sont disposés des sortes de petits gâteaux noirs cylindriques, et une grosse plume noire.

Entre la mare et les tables, un grand divan en fer forgé, tendu de velours rouge rebondi, et une table basse de bois laqué noire sur laquelle sont disposés plusieurs petites coupelles de verre, petites assiettes, baguettes et bouteilles, la plupart vides.
Sur le divan, une belle femme est langoureusement allongée sur la côté, appuyée sur l'accoudoir et une coupelle à la main qui semble levée en un salut vers le ciel. Elle porte une longue robe fendue violette à motifs de papillons noirs qui laisse voir ses jambes démesurément longues, et aux pieds nus. Ses très longs cheveux noirs et raides serpentent sur le divan et son corps, touchant presque le sol.
Courbé auprès de la table basse à s'affairer avec les bouteilles, un grand et mince jeune homme en uniforme noir serré à boutons d'or, ses cheveux courts et peu coiffés aussi noirs que ceux de la femme, et une paire de petites lunettes aux verres oblongs portée bas sur le nez.

Quand tu entres, tu remarques qu'au même moment, sur les cinq autres murs de l'hexagone, coulissent des portes semblables à celle que tu viens de franchir, révélant à chaque fois un individu, seul comme toi.

Après les évènements de la soirée, Menès reste un peu dehors, rentre un peu plus tard et jette un coup d'oeil rapide dans les coins et les meubles de la pièce (y compris derrière le matelas et les murs) puis se couche, roulé dans son manteau sur le matelas.
La pièce semble être nettoyée de frais, et rien ne se cache sous le lit. Les murs sont un peu froids, mais rien de très bizarre.

Menès commence donc à rêver, de sa famille, confusément.