[Déplacé depuis La Campagne] [Aventure] La pension

Dans la rue, seul le silence semble répondre au cri de la jeune fille. Elle distingue pourtant des ombres plus menaçantes que la nuit. Le grand cheval souffle et tape du sabot, soulevant encore la brume légère qui recouvre à présent les pavés. Vous croyez alors percevoir des mouvements furtifs, de chaque côté de la rue, à la limite de la lumière...

Je regarde tour à tour les deux personnes afin de leurs signifier clairement que je les ai vue.

On entend un cri: Maintenant!

Une ombre s'étend sur au dessus du docteur. En un éclair, il est enserré par les mailles d'un filet. Une silhouette a jailli du coin de la maison. On se précipite alors dans votre direction, dévoilant dans les lanternes les hommes qui se cachaient à la limite de la lumière.

Ils sont quatre. Deux se ruent sur le médecin empêtré, un se met entre la pension et le docteur, le dernier se rue sur l'épée dégainée. Il tient une sorte de bâton serré. On ne distingue pas son visage dans sa capuche sombre sur ses habits près du corps.

Je lance un "Au secours !!" en essayant de me dépêtrer du filet.

Alors que je me défends:

"Je vais certainement pas me laisser dépouiller comme ça, vous allez regretter."

L'épée de la jeune fille pare le bâton de métal. Elle le repousse et se précipite immédiatement en direction du docteur. Pendant sa charge, un des chevaux hennit.

Deux des hommes tentent de se saisir du docteur.

Constatant dès que je frémis pour agir que mon vêtement s'est accroché à un clou, je le détache d'une main, puis vais tenter me faufiler le long du mur tant qu'on ne fait pas attention à moi, de sorte à trouver le meilleur angle pour courir vers les rues et places habitées, en criant "A LA GAAAARDE !!! DES BRIGAAAANDS !!!" dès que j'aurais dépassé la 'mêlée'.

Devant le docteur, un des assaillants amortit la charge de la jeune fille qui tentait de le renverser. Il brandit lui aussi un bâton ferré et se prépare à couvrir ses camarades.

Le masque a-t-il oublié l'ombre qui avait jeté le filet sur le docteur? Tandis qu'il se met à hurler, dépassant à peine le coin de la maison, il aperçoit non loin de lui une silhouette menaçante qui tente de l'intercepter.

Apercevant la silhouette sur ma trajectoire, je mets les deux mains en avant, index levés pour capter son attention, et tout en continuant mon mouvement tournant vers la sortie, je marchande avec ma plus belle voix de conspirateur couard:

"Ola ola, fillot, on reste calmes ! C'est eux qui ont des sous, moi j'suis fauché comme les blés. On se laisse tranquilles et j'appelle personne, ça marche ?"

Il grogne et sort son bâton. Comme les autres, il porte des habits sombres et pratiques et son visage est caché par une capuche. Il est plutôt bien bâti.

Retourne là bas. Vite. La voix est basse, enrouée à dessein. Il désigne le perron.

Tout en revenant à reculons et un peu courbé, je baisse lentement les mains maintenant ouvertes:

"D'aaaaccord, je vois que monsieur est du genre boute-en-train..."

La situation paraît fort compromise : le docteur est entravé, la jeune fille a fort à faire avec nos mystérieux agresseurs, et toute possibilité de fuite semble inenvisageable...

Je me mets à tambouriner sur la porte : "OUVREEEZ !"

Je tente toujours de me dégager du filet et d'éviter l'emprise de l'homme, en criant A l'aiiiiide !!

Il semble au docteur que les mailles du filet se font plus serrées. Et rien ne répond depuis la pension.

En plongeant d'un coup les mains qui s'en rapprochaient lentement dans mon sac, et en en sortant une sorte de corde aux extrémités lestées qui semble être déjà en train de tournoyer avant même d'apparaître :

"Dans ce cas, voyons qui de nous deux est le meilleur aux jeux de mains, tu l'auras voulu ! Mais je te préviens, moi c'est mon métier..."

L'homme crache et soupèse son bâton.

"Vous n'êtes pas de simple brigand n'est ce pas?"

Puis je porte une attaque sur l'homme face à moi.

Entre la jeune fille et son assaillant, chacun pare à son tour. Soudain, une ombre s'ajoute à la mêlée.

Le docteur se débat mais des mains le saisissent, le tournent sur le sol et le tirent comme un filet à poisson aux épaules et aux chevilles.

Un cheval hennit.

L'adversaire du masque se fend.

La jeune fille n'a pas le temps de se retourner, ce nouvel assaillant la frappe violemment au flanc.

Alors qu'elle se plie de douleur, son cheval se cabre et rompt ses liens.

Le masque réceptionne avec souplesse son assaillant dans le tourbillon qui l'entoure.

"Ouvrez donc ! C'est urgent, nous sommes menacés par une bande de canailles !"

Non sans une certaine fébrilité, je tripatouille plutôt violemment la poignée dans l'espoir de voir la porte s'ouvrir. Quelques pensées me traversent l'esprit à toute vitesse.

Bon sang, pourquoi tant d'agressivité chez ces gens ? ...Apparemment, ce sont plus que de simple racketteurs ...Mais pourquoi s'en prendre à nous ?

"Eh bien aller, à votre tour !" dis-je avec confiance, en infléchissant les rotations de mon instrument d'un mouvement d'épaule, pour en lancer un des poids contre mon adversaire.

Le coup légèrement amorti par un mouvement du poignet le frappe à la poitrine. Il recule et tente de se maintenir face au tourbillon d'attaques du masque.

L'adversaire du masque se fait plus prudent. Ceux de la jeune fille continuent de l'assaillir en protégeant leurs complices qui se replient entre deux maisons de l'autre côté de la rue, traînant toujours le docteur.